Annulée, l’année dernière, à cause du ravage du coronavirus, la 74ème édition du festival de Cannes, riche en propositions et en stars, s’ouvre, ce mardi 6 juillet 2021, à la Croisette par la projection du film « Annette ».
Le jury, majoritairement féminin, présidé par le cinéaste américain Spike Lee aura, jusqu’au 17 juillet prochain, le loisir de départager les 24 films en compétition pour la palme d’or dont « Lingui » de notre compatriote Mahamat Saleh Haroun et « Haut et fort » du marocain Nabil Ayouch.
Avec « Lingui » , porté par les acteurs Youssouf Djaoro, avec qui il a remporté la Palme d’Or, Rihane Khalil Alio, Achouackh Abakar et autres, le cinéaste tchadien compétit pour la troisième fois après décroché, en 2010, le prix du Jury pour « Un Homme qui crie » et présenté « Grigris » en 2013. Mahamat-Saleh Haroun a été également membre du jury présidé par l’acteur américain Robert De Niro en 2011.
« C’est un mot tchadien. Lingui, c’est le lien (…) Je ne peux exister que parce que l’autre existe, c’est cela le lingui, un lien sacré. Au fond, c’est une philosophie altruiste. Ce mot résume la résilience des sociétés confrontées à des choses assez dures », explique le cinéaste tchadien dans un entretien qui figure dans le dossier du presse du film.
« Lingui », c’est l’histoire d’Amina, qui élève, seule, sa fille Maria, une adolescente, de 15 ans, à N’Djaména, la capitale tchadienne. « Son monde déjà fragile s’écroule le jour où elle découvre que sa fille est enceinte. Cette grossesse, l’adolescente n’en veut pas. Dans un pays où l’avortement est non seulement condamné par la religion, mais aussi par la loi, Amina se retrouve face à un combat qui semble perdu d’avance », annonce le synopsis.
« Cela faisait un moment que je souhaitais dresser le portrait d’une femme tchadienne telle que j’en connais. Ce sont des femmes célibataires, veuves ou divorcées, qui élèvent seules des enfants. Souvent mal vues par la société, elles se débrouillent pour s’en sortir. J’ai connu une de ces femmes qui s’est retrouvée seule avec ses enfants après la mort de son mari. Pour gagner sa vie, elle s’est mise à récupérer des sacs en plastique pour fabriquer des cordes et les vendre. Je voulais rendre compte de la vie de ces femmes un peu marginalisées, mais qui ne se vivent pas comme des victimes. Ce sont les petites héroïnes du quotidien », estime Mahamat-Saleh Haroun.
Quant à l’avortement, ajoute le réalisateur tchadien, il « est toujours interdit » au Tchad. « Mais, certains médecins le pratiquent, ouvertement, pour venir en aide aux femmes en détresse. Au nom du lingui, bien entendu.Tout cela, m’a inspiré le sujet de ce film. »
En dehors de la compétition officielle du Festival de Cannes, d’autres cinéastes africains sont attendus sur la Croisette.
L’Egyptien Omar El Zohairy est en compétition à la Semaine de critique, l’autre section parallèle du festival avec son premier film, « Feathers », l’histoire d’un tyrannique père de famille transformé en poule à la faveur d’un tour de magie raté. Son épouse, jusque-là dévouée et soumise, va gagner en indépendance pour pallier l’absence de son mari transformé en gallinacée. Le long métrage de la cinéaste franco-tunisienne Leyla Bouzid, « Une Histoire d’amour et de désir », est, lui, le film de clôture de la Semaine.
La 74ème édition du festival sera l’occasion de faire voyager les cinéphiles sur le continent africain à Djibouti, Algérie… à travers les oeuvres des cinéastes tels que le finlandais, d’origine somalienne, Khadar Ayderus Ahmed, The Gravedigger’s Wife (La Femme du fossoyeur) , le brésilien Karim Aïnouz avec O Marinheiro das montanhas (Le Marin des montagnes), film de la Sélection officielle projeté en Séances spéciales.